L’arrivée d’une maison d’édition de textes de théâtre en Belgique francophone est trop rare pour ne pas être saluée et encouragée ! C’est au cœur de la pandémie, en 2020, qu’Aurélie Vauthrin-Ledent a fait le pari un peu fou de soutenir la création théâtrale par l’édition en lançant, dans une démarche coopérative, une collection de petits livres de théâtre au format A5 et au prix de 10 euros (!) sous le joli nom de « les oiseaux de nuit ».
Continuer la lecture « Delphine Peraya, une nouvelle auteure de théâtre »Wajdi Mouawad et sa Mère Courage
Un grand spectacle autobiographique au Théâtre de la Colline — Paris
« Comme Dieu ne pouvait pas tout faire, Il a inventé les mères », dit un proverbe du Proche-Orient. Dans bon nombre de cultures et des situations extrêmes, elles agissent comme Son substitut et, vouées à cette tâche extrême, les mères s’épuisent en efforts, s’érigent en gardiennes de leurs proches, veillent sur eux et s’assument meurtries jusqu’au sacrifice de soi. Elles s’érigent en Dieu, un Dieu laïque, familial et souvent débordé par les épreuves de la vie. Comme Mère Courage de Brecht ou une autre, de la même famille, cette Mère de Wajdi Mouawad. Les deux se trouvent confrontées à la guerre… comment être mère pendant la guerre ? À la même question, réponses similaires. Mères qui se protègent des émotions et livrent un combat sans merci sur fond d’exaspération excessive qui ne peut conduire qu’à la défaite finale, défaite crainte et pourtant inévitable. Mères Courage… Wajdi renonce et à l’article défini de « la mère » et à l’épithète « courage » pour proposer le titre générique de… Mère.
Continuer la lecture « Wajdi Mouawad et sa Mère Courage »Danses sacrées afro-brésiliennes : Eshou et la communication entre les mondes visibles et invisibles
ENTRETIEN AVEC FANNY VIGNALS, réalisé en visioconférence au Centquatre-Paris, le 23 janvier 2021(1)
José Vincente Gualy Blanco : Nous avons lu la synthèse de votre projet de recherche La Bouche du Monde. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur Eshou et les divinités orishas en général?
Fanny Vignals : On se trouve ici sur une ligne qui vient d’Afrique. Le culte aux orishas a été déplacé au Brésil par les yorubas du Bénin, du Nigeria, du Ghana et du Togo, pendant les vagues d’esclavage des XVIe et XVIIIe siècle. Arrivés au Brésil, ces peuples étaient mélangés à d’autres esclaves, dans le but d’être fragilisés. Les orishas ont donc été rassemblés dans une sorte de famille divine recomposée, qu’on retrouve aujourd’hui dans la religion du candomblé, dans la ligne du candomblé qu’on appelle ketu plus exactement. Les orishas peuvent aussi être présents dans d’autres cultes comme l’umbanda, le quimbanda ou le Tambor de Mina. Chaque orisha correspond à un élément de la nature mais aussi à des mythes et à des traits de caractères spécifiques. En yoruba « orí » c’est la tête, et « sha» est associé à la lumière. Donc l’orisha est comme« la lumière de la tête ». On dit que chaque personne a un orisha « de tête », une divinité qui constitue une partie de son essence, et avec laquelle il est bon de communiquer.
Continuer la lecture « Danses sacrées afro-brésiliennes : Eshou et la communication entre les mondes visibles et invisibles »Le cercle de la violence. Baby Doll, portrait de réfugiées
Propos recueillis par Leyli Daryoush
À l’opéra, en raison du livret, je ne suis pas libre d’écrire l’histoire qui me traverse. Baby Doll[1]est une commande de l’Orchestre de chambre de Paris pour la 250ème année de la naissance de Beethoven. Le choix d’une symphonie du compositeur m’a été accordé et j’ai proposé la 7ème pour en faire une sorte d’opéra pour notre temps.
Continuer la lecture « Le cercle de la violence. Baby Doll, portrait de réfugiées »Loco
d’après le journal d’un fou de Gogol.
Un spectacle de Natacha Belova et Teresita Iacobelli.
Au théâtre avoisinent le grand et le petit.
En découvrant la remarquable adaptation que Natacha Belova et Teresita Iacobelli ont faite du journal d’un fou de Gogol (« loco » signifie fou en espagnol) (1), je me suis rappelé l’impressionnant Revizor (l’inspecteur général) du même Gogol mis en scène par Mathias Langhoff au tournant du siècle que j’avais invité au théâtre National dans le cadre de Bruxelles 2000, ville européenne de la culture.
Un bondissant Martial di Fonzo Bo (tiens, un Argentin, pas loin du Chili de Teresita…), mélange de Buster Keaton et de Charlie Chaplin évoluait dans un immense décor en forme de tour de Babel. Langhoff prenait appui sur la fable ( un blanc-bec bien fringué se fait passer pour l’envoyé du gouvernement et en profite pour s’en mettre plein les poches) pour déployer un comique dur et blessant qui faisait mouche ; un théâtre de la rage.
Avec Loco, c’est un tout autre Gogol qui est mis à jour : celui de la tendresse et de la fragilité humaine.
Continuer la lecture « Loco »Éloge de l’altérité
lettre à Isabelle Pousseur (25/10/2021).
Chère Isabelle,
Nous entretenons depuis de longues années une relation de connivence avec l’art, l’écriture et le théâtre qui si elle s’est distendue depuis que je me suis un peu éloigné des soirées théâtrales reste toujours vivante.
C’est comme actrice que tu apparais en couverture du numéro 2 d’Alternatives théâtrales en 1979 en compagnie d’Amid Chakir.
C’est en conférencière, metteure en scène, femme… et actrice — dans ce savoureux mélange des genres — que je t’ai retrouvée hier dans la très stimulante conférence-spectacle théâtrale et musicale : « Éloge de l’altérité » (1) que tu as proposée au théâtre Océan Nord.
Continuer la lecture « Éloge de l’altérité »Programme Teatro em Comunidades : dix ans de dialogues entre université et favela
Le souvenir de l’après-midi passée avec un groupe d’adolescents à Nova Holanda, l’une des seize communautés qui composent la favela da Maré, reste encore gravé dans ma mémoire. La rencontre a eu lieu en 2010. J’étais accompagnée de quelques étudiants de l’Universidade Federal do Estado do Rio de Janeiro — UNIRIO et le but de notre visite était de discuter avec ce groupe d’adolescents du quartier sur l’idée de mener un projet théâtral avec eux. La proposition a été accueillie avec enthousiasme et, la semaine suivante, nous avons entamé des cours de théâtre dans un espace de l’association Redes da Maré. Surgissait ainsi l’ébauche du programme d’extension universitaire Teatro em Comunidades[1] (Théâtre dans les communautés) qui accomplira, en 2021, une décennie d’existence.
Continuer la lecture « Programme Teatro em Comunidades : dix ans de dialogues entre université et favela »Cimetière marin, fantômes de l’Occident. Le Vaisseau du bout du monde d’Àlex Ollé
Créée à l’Opéra de Lyon en octobre 2014, la mise en scène du Vaisseau fantôme par Àlex Ollé[1], cofondateur de la compagnie catalane La Fura dels Baus, est portée par une critique politique et sociale trouvant sa synthèse dans une perspective écologique. Le metteur en scène trace avec ce spectacle une voie originale dans l’écocritique du capitalisme mondialisé – champ encore nouveau alors sur les scènes lyriques internationales – contribuant au renouvellement de l’approche de la nature dans le répertoire wagnérien.
Continuer la lecture « Cimetière marin, fantômes de l’Occident. Le Vaisseau du bout du monde d’Àlex Ollé »Réparer un territoire, imaginer de nouveaux récits Comment la question écologique travaille les maisons d’opéra
En avril dernier, l’Opéra de Lille a obtenu la certification internationale ISO 20121 qui atteste de ses bonnes pratiques en matière de développement durable : parmi ces pratiques certifiées figurent certes les dons de costumes et de décors déclassés, l’utilisation de matériaux réutilisables, le remplacement du parc des projecteurs par des LED, mais aussi l’engagement de la maison en faveur de la diversité et de l’égalité professionnelles, ses actions artistiques et culturelles, sa politique tarifaire ou encore son ancrage territorial. La variété de ces indicateurs est révélatrice du caractère transversal de la réflexion écologique aujourd’hui.
Continuer la lecture « Réparer un territoire, imaginer de nouveaux récits Comment la question écologique travaille les maisons d’opéra »Décors et matériaux. Impact environnemental, conception et fabrication, montage, conservation, déplacements, recyclage
Continuer la lecture « Décors et matériaux. Impact environnemental, conception et fabrication, montage, conservation, déplacements, recyclage »Dialogue à plusieurs voix, réalisé par Caroline Godart et Sylvie Martin-Lahmani avec Agathe Chamboredon (La Monnaie, Bruxelles), Sophie Cornet (La Monnaie, Bruxelles), Véronique Fermé (Festival d’Aix-en-Provence), Philippe Sagnes (Opéra National de Lyon) et Valentina Bressan (Opéra national de Paris).