Frie Leysen, fondatrice du Kunstenfestivaldesarts et figure emblématique des arts de la scène en Belgique et dans le monde, s’est éteinte le 22 septembre 2020. Lissa Kinnaer, qui a dirigé le Réseau des arts à Bruxelles et travaille aujourd’hui pour le Kunstenpunt, lui rend hommage.
Le visage souriant, les yeux pétillants et légèrement plissés lui donnant parfois l’air un peu espiègle, les cheveux blancs en pétard, la silhouette frêle d’une femme pleine d’énergie, d’entrain et de curiosité. Une femme drôle, humble et visionnaire. Une présence chaleureuse. Le souvenir de Frie Leysen me poursuit depuis l’annonce de son décès, il y a maintenant un mois déjà. Bizarrement, le simple fait de penser à elle me donne le sourire. En pensant à elle, je pense à nous, à vous, à toutes celles et ceux qui ont eu la chance de croiser son chemin. Je suis heureuse de l’avoir rencontrée au début de mon parcours professionnel dans le secteur artistique bruxellois : j’avais 24 ans, je revenais de Londres où j’avais complété mes études par un master, j’avais plein d’idées et d’ambitions, et je n’avais encore jamais travaillé pour une organisation artistique. Je connaissais un peu le Kunstenfestivaldesarts, mais je ne savais pas à quel point ces deux années (les deux dernières années de Frie en tant que directrice du festival) au sein de son équipe allaient être une expérience marquante et formatrice. J’y ai appris (Frie m’a appris) que les limites pouvaient toujours être déplacées. Ce festival, piloté depuis le Quai du Commerce, a eu l’audace de rassembler des lieux culturels tant francophones que néerlandophones autour d’un projet rassembleur de renommée internationale. Dépasser les lignes et les frontières, c’était son truc. Créer des ponts entre les flamands et les francophones de ce pays, entre les artistes et le public, entre les artistes d’ici et d’ailleurs. Cet ailleurs a toujours été présent au festival, et il venait parfois de très loin, mais toujours de manière juste, contemporaine et loin des clichés. Ça aussi c’était son truc, fuir l’exotisme, dépasser notre eurocentrisme, rester au plus près de l’humain et de la création artistique, et toujours garder l’artiste au centre des priorités.
La vision de Frie Leysen continue à vivre en tous ceux (et nous sommes nombreux) qui ont eu le privilège de travailler à ses côtés. Elle est et restera une grande source d’inspiration pour tout le secteur des arts de la scène à Bruxelles, et au-delà.